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L’île du couchant une rencontre avec le sultan Moulay Ismaïl

By septembre 19, 2021 octobre 1st, 2021 Actu

À l’occasion du lancement de son dernier ouvrage, nous avons eu le plaisir d’échanger avec Gilbert Sinoué, auteur prolifique qui, après l’Egypte, l’Espagne déchirée par la guerre de reconquête, l’Anatolie ou encore l’Arménie, s’est penché pour la première fois sur le Royaume Chérifien. Baptisée «L’ile du couchant», cette épopée faite de déchirements, d’intrigues et de gloire se découvre à travers le regard d’un Français, Casimir Giordano, médecin personnel du sultan Moulay Ismaël.

 

 

 

 

«Je ne sais pas jamais à l’avance quel sera mon prochain sujet d’écriture. Je ne les choisis pas. J’ai coutume de dire que ce sont eux qui me tirent par la manche ! Cela a toujours été comme cela. Je ne me ferme à rien. Demain matin, je commencerais peut-être un thriller…»

 

D’où vient votre passion pour les fresques historiques orientales?
Peut-être parce que je suis tout simplement issu d’Orient. Je suis né en Egypte, j’y ai grandi, j’y ai fait mes études. Comment ne pas être imprégnés de sa culture et de ces fameuses fresques orientales? Leur écriture, c’est un goût que j’ai développé assez vite. Je ne me l’explique pas mais j’avais envie d’écrire comme le font les conteurs arabes.

Est-ce qu’à travers vos écrits, vous avez une volonté particulière de transmission?
En règle générale, ma volonté à travers mes 35 romans a toujours été d’essayer de transmettre ce qui est difficile de manière facile. Les livres d’histoires et les écrits universitaires, certes, ne manquent pas mais ils demeurent assez peu accessibles au grand public. Moi, ce que j’ai toujours apprécié c’est la manière qu’avait mon grand-père de partager avec moi des choses compliquées en des termes simples, ce qui me permettait de les comprendre. À mon tour, je tente de faire la même chose, alors oui, on peut considérer que je transmets des histoires à destination de tous les publics.

Considérez-vous vos œuvres comme étant porteuse de messages?
Je n’aime pas trop ce terme car je trouve que cela fait un peu prétentieux. Je préfère rester sur le terme de transmission. J’aime partager des idées qui me tiennent à cœur comme par exemple le rôle de la femme dans la société. Je suis émerveillé quand je découvre le destin de femmes comme Huda Sharawi (pionnière du féminisme égyptien). Les femmes arabes qui ont comptés dans nos sociétés ne manquent pas, toutefois on oublie trop souvent de les citer. J’essaie de mettre en lumière le rôle fondamental qu’ont joué les femmes dans l’histoire. Je tente aussi toujours de faire passer l’idée de tolérance et d’acceptation de l’autre, quelque soit sa race, sa religion ou encore sa croyance.

Pourquoi avoir choisi d’explorer le Maroc à travers votre nouvel ouvrage?
Il s’agit d’un concours de circonstance. J’ai coutume de dire que c’est le sujet qui me tire par la manche et qui me dit : écris-moi !

Qu’est-ce qui vous a poussé à débuter cette exploration avec le personnage du sultan Moulay Ismail?
C’est indiscutablement l’un des plus grands sultans qui a régné sur le territoire marocain. C’est aussi l’un des plus long règne. Mais c’est surtout l’homme qui a tenté l’impossible ! C’est-à-dire unir un pays d’une telle complexité et obtenir l’indépendance vis-à-vis des puissances étrangères. Il est également fascinant de par ses ambitions de grand bâtisseur. Contemporain de Louis XIV, lui-même roi-bâtisseur, il a été surnommé le Roi-Soleil marocain. J’estime que les historiens soulignent exagérément sa réputation de grande cruauté. Il n’était pas plus cruel qu’un Bonaparte ou Méhémet Ali. Tout comme eux, il est le fruit d’une époque.

Quelle est la plus grande part de fiction dans ce récit?
Mystère… Il y a une part de fiction et une part de vérité et les éléments sont distillés de telle sorte à ce que moi-même je m’y perde. Tout ce que je peux dire c’est que j’ai tenu à les imbriquer en conservant la verve du romancier et le sérieux de l’historien afin de ne pas dire trop de bêtises.

Gallimard décrit «L’Ile du couchant» comme le premier volume d’un «Guerre et Paix Oriental», que pensez-vous de cette description?
Il s’agit surtout d’un « Guerre et Paix Magrébin ». C’est ce que nous inspire l’historie du Maroc à cette époque : des guerres perpétuelles, des confrontations entre familles, les rivalités entre les clans, l’arrivée sur la scène de l’Occident, etc. Et comme chez Tolstoï, derrière la grande Histoire, une histoire d’amour se dessine en filigrane.

Il est déjà question d’un second tome, de quoi traitera-t-il?
Il portera sur les manigances occidentales pour mettre la main sur le pays jusqu’à 1912. Les interactions entre les différentes puissances- Espagne, Angleterre, France- ont tout simplement été machiavéliques.

Vous traitez à nouveau d’un sujet assez délicat, est-ce un trait qui vous caractérise?
Plus c’est délicat et plus cela me passionne ! Je ne vois pas d’intérêt à produire des ouvrages consensuels. Avec mon premier tome, j’ai déjà eu un retour fabuleux du public marocain qui va bien au-delà de mes espérances.