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Le droit d’être soigné… et entendu

By décembre 10, 2025 Enfant

Que recouvre, concrètement, le droit à la santé des enfants ? Derrière les textes, il y a des pratiques, des choix et des vigilances au quotidien. Pour y voir clair, nous avons rencontré le docteur Massilia Bouhmidi, pédiatre. Un entretien sensible.

 

Que représentent, dans votre pratique quotidienne de pédiatre, les droits de l’Enfant ?
Pour moi, les droits de l’Enfant sont bien plus qu’un cadre juridique : ils constituent le socle éthique de toute pratique pédiatrique. Chaque enfant a droit au respect, à l’écoute, à la protection et à la prise en compte de sa singularité.
Au quotidien, cela signifie veiller à ce que chaque décision médicale serve son intérêt supérieur, en respectant sa dignité et sa parole, même lorsqu’il est trop petit pour s’exprimer.
C’est aussi sensibiliser les parents à une parentalité consciente, où le soin ne se limite pas à la santé physique mais englobe l’émotionnel, le développement et l’environnement affectif de l’enfant. En somme, défendre les droits de l’enfant, c’est rappeler que derrière chaque symptôme se trouve une personne en devenir, qui mérite d’être entendue et accompagnée avec bienveillance.

Quels sont aujourd’hui les principaux défis pour garantir à chaque enfant un accès équitable aux soins de santé ?
Le premier défi demeure les inégalités d’accès, liées au lieu de résidence et au contexte socio-économique : certains enfants bénéficient d’un suivi régulier, d’autres en sont encore trop éloignés. S’y ajoutent des défis humains et organisationnels : surcharge des structures, manque de temps d’écoute et, parfois, méconnaissance des besoins spécifiques de l’enfant.
Garantir l’équité, c’est renforcer la prévention, développer les consultations de proximité et valoriser une pédiatrie humaine et relationnelle, où chaque enfant, quel que soit son milieu, a droit à une prise en charge complète, respectueuse et bienveillante.

Quels signaux doivent alerter les parents sur la santé mentale ou physique de leur enfant ?
Un enfant qui va mal n’a pas toujours les mots pour le dire. Les signaux passent souvent par le corps ou le comportement : troubles du sommeil, perte d’appétit, isolement, régression, irritabilité inhabituelle, ou douleurs récurrentes sans cause organique claire.
Sur le plan psychologique, tout changement durable de son humeur ou de ses habitudes doit éveiller la vigilance.
L’essentiel est de faire confiance à son instinct de parent : au moindre doute, consulter. Parler tôt permet souvent d’éviter que le mal-être ne s’installe.

Comment s’assurer que l’avis de l’enfant soit pris en compte dans les décisions médicales qui le concernent ?
Même très jeune, un enfant ressent, comprend à sa manière et a besoin qu’on lui explique ce qu’il vit. Prendre en compte son avis, c’est lui donner une place active : expliquer avec des mots adaptés, l’écouter, reformuler ses peurs et ses attentes. C’est aussi un geste de respect et de confiance qui nourrit son développement émotionnel et construit son autonomie. En pédiatrie, la communication bienveillante est un soin à part entière  : elle fait de la relation médicale un véritable partenariat entre l’enfant, ses parents et le soignant.

Soigner un enfant, c’est aussi préparer l’adulte qu’il deviendra.

Quel rôle les pédiatres jouent-ils dans la détection des violences et des négligences ?
Le pédiatre est souvent le premier témoin discret de la souffrance d’un enfant. Il doit rester attentif à chaque détail (un regard, un silence, une lésion qui ne concorde pas avec le récit), tout en respectant la parole de l’enfant et le cadre légal du signalement.
Notre rôle est d’abord de protéger : oser questionner avec délicatesse, documenter et agir avec responsabilité. C’est un devoir moral autant que médical.
Former les soignants au repérage précoce et renforcer la collaboration avec les structures de protection de l’enfance sont essentiels pour rompre le silence autour des violences faites aux enfants.

Comment, selon vous, la pédiatrie devrait-elle évoluer pour mieux répondre aux besoins des enfants d’aujourd’hui et de demain ?
La pédiatrie de demain doit être plus globale, plus préventive et plus humaine. Les enfants grandissent dans un monde rapide, connecté, parfois anxiogène. Il faut s’adapter aux nouveaux enjeux : sommeil, usages numériques, santé mentale, alimentation, environnement et climat. L’accompagnement doit embrasser la santé physique, émotionnelle, psychologique et environnementale.
Concrètement, cela exige davantage de temps d’écoute, une coopération étroite entre pédiatres, psychologues, éducateurs et familles, ainsi qu’une sensibilisation accrue à une parentalité consciente.

Repères et contacts :
Bd des F.A.R, rue 12, immeuble 1, 1er étage (à côté de la gare routière,
au-dessus de la glacerie Smi), Nador Tél. : 05 22 33 12 33
E-mail : drmassiliabouhmidi@gmail.com