fbpx

«Bent Darhoum» la technologie pour promouvoir l’égalité des sexes

By mai 11, 2023 Actu

Houda Charhi a décidé de prendre les choses en main pour promouvoir l’empowerment des femmes marocaines via les réseaux sociaux via sa plateforme « Bent Darhoum ».
Dans cette interview, elle partage sa vision de la lutte pour l’égalité des sexes au Maroc, ses principales stratégies pour promouvoir l’empowerment des femmes marocaines et ses réalisations à ce jour.

 

Qu’est-ce qui vous a motivé à créer «Bent Darhoum» ?
J’ai créé Bent Darhoum à la fin de 2019 suite à un manque de représentation féministe locale que je ressentais sur les réseaux sociaux. En termes de contenu informatif ou simplement de sensibilisation aux droits des femmes, je ne trouvais que des sources européennes ou américaines. Bien que ce contenu soit qualitatif, les thèmes restent bien évidemment différents et surtout, propres aux problématiques et enjeux locaux. J’attendais donc impatiemment qu’un quelqu’un prenne l’initiative de créer du contenu propre à notre culture et nos problématiques marocaines locales. Et puis un jour, je me suis dit, pourquoi pas moi ? Depuis décembre 2022, mon amie Zineb s’est jointe à moi et nous travaillons ensemble sur la création de contenu pour la plateforme Instagram de Bent Darhoum.

Les réseaux sociaux ont facilité et encouragé la lutte des femmes pour l’égalité des sexes au Maroc. Les femmes peuvent maintenant partager leurs pensées et leurs idées progressistes sans dépendre des médias traditionnels. Les réseaux sociaux leur offrent une plateforme pour s’exprimer librement et être entendues par de grandes audiences. De plus, ces plateformes permettent aux femmes de créer des communautés qui partagent leurs objectifs et peuvent se soutenir mutuellement. Les réseaux sociaux ont donc contribué à donner plus de visibilité et de voix aux femmes marocaines et à la lutte pour l’égalité des sexes.
Dans un contexte local où une seule idéologie tenait le monopole, les réseaux sociaux ont permis l’émergence d’une autre pensée dans la sphère publique et la fin de la dictature idéologique. Nous sommes désormais habitués à entendre des pensées progressistes, et ce qu’on retient c’est la libération de la parole des femmes, que cela plaise ou non.

Quels sont les principaux objectifs de «Bent Darhoum» ?
Bent Darhoum a pour objectifs d’encourager la libération de la parole des femmes sur les réseaux sociaux, de sensibiliser aux inégalités hommes-femmes et de rappeler l’histoire en mettant en lumière des icônes féminines locales supprimées de notre mémoire collective. Ce dernier point est très important pour moi car j’ai personnellement grandi sans connaître l’histoire de nos figures locales. La plupart des femmes qui ont contribué au rayonnement du Maroc au fil de l’histoire n’ont jamais figuré dans des manuels scolaires. Il n’y a pas de rues ou d’avenues portant leurs noms. Je pense par exemple à Zaynab Nafzaouia, Malika al-Fassi, Khnata Bent Bakkar ou Touria Chaoui. Il est très important pour moi de saluer leur mémoire et d’honorer leurs parcours car leur existence même prouve que nos valeurs féministes ne sont ni des concepts importés ni des principes contraires à nos traditions. Finalement, ces trois objectifs sont également une manière pour nous de contribuer à un futur dans lequel les petites filles peuvent grandir avec toutes les clés en main, et cela à travers des repères, du contenu informatif et une représentation féminine locale.

Comment pensez-vous que la société marocaine peut s’améliorer afin de mieux soutenir les femmes ?
Il y a plusieurs manières de nous soutenir dans notre combat pour l’égalité.
Si on est dans une démarche bienveillante, la première chose à faire, à mon avis, est d’écouter. Il est important d’être capable de se mettre en retrait et d’écouter les revendications des associations et des militantes. Cela permet de mieux comprendre leurs expériences et leurs points de vue.

Dans la même continuité, il est aussi important d’éviter de parler à la place des femmes et de décider pour elles de ce qui est bien pour elles. Pour illustrer cette idée, je me souviens avoir récemment assisté à une conférence sur l’égalité dans l’héritage où tous les intervenants étaient des hommes. De même, il n’est pas rare que des discussions concernant les droits des femmes aient lieu sans leur participation. Un débat sain ne peut avoir lieu si les femmes sont toujours réduites au silence et que leurs voix sont jugées superflues dans un débat sur leurs propres droits. Ainsi, on ne fait qu’entretenir les mêmes schémas de la société patriarcale qu’on déguise en progressisme.
Être un véritable allié des femmes, c’est savoir multiplier la résonnance de leurs voix au lieu de parler à leur place.

Quelles sont vos principales réalisations à ce jour ?
Les principales réalisations à ce jour sont le lancement de ma plateforme sur les réseaux sociaux qui m’a permis d’être plus présente sur le terrain et d’être impliquée dans des projets à impact fort en collaboration avec d’autres militants marocains. Je partagerai bientôt plus d’informations à ce sujet.

Quelle stratégie pour
promouvoir l’empowerment des femmes marocaines ? Une stratégie efficace pour promouvoir l’empowerment des femmes marocaines consiste à publier des informations et des contenus de sensibilisation sur des sujets tels que le harcèlement sexuel, le droit à l’IVG, les différentes formes de sexisme ordinaire, etc. Il est également important de mettre en avant des profils de figures féminines marocaines historiques afin de les rendre visibles et de les présenter comme des modèles. Enfin, l’utilisation de contenus news et faits divers pourrait aider à maintenir la conversation et à encourager l’engagement et le débat sur ces sujets.

Quel conseil aux femmes qui souhaitent participer à la lutte pour l’égalité des sexes ?
J’ai un seul conseil à donner aux femmes qui souhaitent participer à la lutte pour l’égalité des sexes : puissiez-vous vous défaire de la peur de déplaire. Puissiez-vous vous rappeler que le féminisme est une cause que vous défendez pour le bien commun. Puissiez-vous ne plus craindre les critiques, l’opposition, la réprobation ou le fait de ne pas faire l’unanimité. On vous dira que vous êtes dramatiques, que vous n’avez pas de quoi vous plaindre, que vous êtes folles ou agressives, et que vous en faites trop.
Et quand cela arrivera, puissiez-vous vous rappeler des noms de toutes ces icônes féministes qui n’étaient pas populaires à leur époque mais qui ont pourtant marqué l’histoire.